Au plan juridique, la Bretagne n'a jamais été réunie à la France
Malgré d'excellents ouvrages publiés depuis trente ans sur
l'histoire de la Bretagne, par les universitaires bretons,
l'histoire de ce que l'on a appelé, abusivement, la réunion du
Duché à la Couronne de France, est encore à écrire.
Les compétences, le sérieux, l'honnêteté de nos chercheurs ne sont
pas en cause. Mais il leur manque une dimension essentielle, qui ne
s'acquiert que par l'étude, et une infinie patience : la
connaissance du Droit, particulièrement du droit médiéval.
Dans ce domaine, je crois avoir accompli un cursus complet, non
seulement en obtenant tous les grades universitaires, jusqu'au
doctorat inclus, mais en enseignant plusieurs disciplines
juridiques dans les facultés, et en publiant de très nombreux
articles et ouvrages, pendant près de quarante ans.
Au plan juridique, la Bretagne n'a jamais été réunie à la
France. En 1532, il y eut avec la complicité de quelques barons et
principaux du Duché, un acte par lequel la Bretagne, Etat
indépendant et souverain, fut censée solliciter la jonction
perpétuelle du Duché avec son ennemi millénaire, le royaume de
France. Cet acte fut arraché aux Etats, qui eussent, sans aucun
doute, opposé un veto péremptoire à ce sabordement programmé de la
Principauté, alors la troisième puissance européenne, après la
France et l'Angleterre, s'ils n'avaient été subjugués.
Par quel mécanisme ce montage, savamment préparé, fut-il dénommé
Traité (ou Contrat, les deux termes étant synonymes), y compris par
les Bretons, qui feignirent de croire à sa validité ?
C'est ce que je démontrerai en son temps.
Le fait est que ce prétendu Traité était juridiquement nul dès
l'origine, et, comme tel, de nul effet. Ce fut un trompe l'œil
hypocrite pour les deux parties, dont les Bretons surent, avec une
habileté consommée, tirer parti jusqu'en 1789, date à laquelle la
Bretagne, cette fois anéantie, se vit interdire ce qui avait été sa
fierté : sa Dignité de Nation.
Dès ce moment, de partielle qu'elle était, l'annexion devint
totale, jusqu'à aujourd'hui. La parole fut ôtée aux Bretons, y
compris à leurs historiens, qui durent composer, à peine de se voir
priver de toute carrière et de tout avenir.
Il y a seulement quelques dizaines d'années qu'ils osent la
retrouver, petit à petit.
Les chroniques qui suivent sont extraites du Mémoire de doctorat
soutenu devant la Sorbonne (U.F.R.), en 2001. Elles paraîtront à
raison de deux par mois, pendant une année environ. Suivront- en
principe -, d'autres chroniques sur le prétendu Traité de 1532, et
sur la manière dont il doit être analysé, non en se bornant à
énumérer les faits d'une manière chronologique, non au regard du
droit actuel, mais au regard du droit médiéval.
Ces études - en particulier la reconstitution du droit applicable à
cette sorte d'acte, au moment ou il fut imposé à la Bretagne -, a
exigé dix années de recherches.
Les Bretons d'aujourd'hui ne souhaitent pas de contentieux avec
la France. Ils ne peuvent imputer à ce pays les injustices dont il
se rendit coupable dans le passé. Mais ils veulent voir renaître
leur Identité, en tant que Nation, dans l'Europe qui se constitue
sous leurs yeux, et à laquelle ils adhèrent, dans leur grande
majorité. A la manière de l'Ecosse, du Pays de Galles, de la
Catalogne, du Pays basque, de l'Estonie, de la Lithuanie, de la
Lettonie, de la Slovaquie, de la Slovénie, de la Croatie, et
d'autres pays qui, après avoir été rayés de la carte, ont retrouvé,
grâce à l'Europe, leur personnalité en même temps que leur fierté
nationales.
Cette renaissance, déjà très avancée, se fera dans le respect
strict de leurs droits territoriaux, qui sont imprescriptibles.
Les Bretons sont un peuple pacifique, épris d'équité et de Liberté. Ils réprouvent la violence. Ce processus se fera dans le respect du Droit, et dans la sérénité, par degrés.
Louis MELENNEC